Serge DUTFOY. Histoire du rock en BD

 

En 1984/86 Serge DUTFOY dessine HISTOIRE DU ROCK (1984/1986) éditions HACHETTE/VAN DE VELDE avec Dominique Farran, notre rockologue directeur des programmes à RTL et Michael SADLER.

Un premier parcours. L'album va se refermer. On passe par les pages de garde, le bureau désert de l'équipe de CAT ROCK NEWS où la radio est restée branchée.

IN A WHILE CROCODILE (réponse subtile à la page précédente SEE YOU LATER ALLIGATOR)...
 Entretien avec Franck SENAUD . Octobre 2019.


Serge tu as produit en 1984 (avec Farran et Sadler) LA meilleure histoire du rock en BD. Quel rapport as-tu avec la musique ? Quels images as tu publiées dans les magazines musicaux?

 

Fin 1983 : Francis Van de Velde, directeur des éditions du même nom me propose de m’attaquer au projet HISTOIRE DU ROCK. Il y aura plus de 100 planches à réaliser pour ce qui serait mon premier album BD et j’hésite…

J’ai 41 ans, je suis prof d’arts plastiques au lycée La Ramée à Saint-Quentin (02), je suis marié, ma femme ne travaille pas, nous avons 2 enfants (8 et 13 ans) et nous venons d’acheter une maison à la campagne pas loin de Saint-Quentin.

Depuis longtemps, en dehors de l’enseignement, j’essaie de placer des dessins et des illustrations dans la presse, l’édition, la publicité. Des revenus non négligeables, mais très irréguliers, ce qui fait que de nature prudente, je ne compte pas abandonner mon boulot de prof pour faire « artiste » à temps complet.

Un album complet, avec un scénariste possible que je viens de rencontrer, c’est bien tentant, mais ça sous-entend un sacré boulot pendant 2 ans au moins, avec la pression d’une date de sortie déjà programmée avec la coédition Hachette pour 1986.

En suis-je capable ?

 

2è FLASH BACK !

Mon background d’artiste jusque-là n’est pas négligeable, mais il est très multidirectionnel !

Ma formation très académique de 3 ans au lycée Claude Bernard (Paris XVIè) m’a permis d’obtenir le CAPES, et je suis « titulaire » de mon poste.

Ma culture personnelle est un peu moins académique, j’ai été lecteur assidu des « illustrés » classiques de ma génération : Tintin, Spirou, le Journal de Mickey, Pilote qui apparait à la fin des années 50.

J’aime aussi les cartoonistes Dubout, Chaval, Bosc, Ronald Searle.

Tous ces domaines très mal vus à Claude Bernard (n’existe que le grand art !) en tous cas totalement ignorés.

Dans mes souvenirs, j’ai toujours dessiné, ce n’est pas mal vu chez moi, ma mère ne dessine plus mais avait un réel talent lorsqu’elle était à l’école, ma tante Germaine graphiste-illustratrice qui vit à Paris et a fait les Arts Déco m’encourage, je visite avec elle des expos (Van Gogh, Toulouse-Lautrec, l’art turc…).

En 1958, je suis lauréat d’un concours de dessin et j’ai une demi-planche publiée dans Spirou !

 

J’ai 16 ans, et fort de ce « succès », je me suis lancé dans des projets très Spirou, un récit de cape et d’épée qui s’arrête à la 16è planche. Le journal parle souvent de ses dessinateurs (Franquin, Morris) et donne des conseils, des informations sur le métier : travailler en grand format, à l’encre de Chine, la couleur vient à part, etc… Je suis dessinateur et scénariste et l’histoire s’embourbe !

Je m’essaye aussi à la caricature (mes profs !), au dessin d’humour comme le publie Paris Match…

Je passe le bac et le concours d’entrée au lycée Claude Bernard ; je rate les 2 en 1960, et ça marche en 1961 !

En sortant de Claude Bernard diplôme de prof en poche, je pense plutôt à l’illustration ayant réalisé comme « monographie » de fin d’études une interprétation de « l’ile au trésor » de Stevenson dans un esprit Alain le Foll .

 

Ma première commande, ce sera chez « les 2 coqs d’or », un petit bouquin sur Richard Cœur de Lion. J’ai couru toutes les maisons d’édition avec mon book.

A Saint-Quentin, je travaillerai pas mal pour la pub, avec l’agence Havas Nord-Est.

Je me lance aussi sur de nouveaux projets BD, destinés à Spirou, à Pilote, que je vais présenter à ces journaux . Je reçois des encouragements …

Mon book d’illustrateur sous le bras, je vais tenter ma chance de temps en temps à Paris : maisons d’éditions, magazines, agences de publicité.

Le jazz qui est une de mes passions m’amène aux magazines Jazz Hot, Jazz Magazine, Rock & Folk qui me prennent quelques dessins, des pages BD…

En 1977, j’ai une commande de Flammarion pour une énième version de Cendrillon !

C’est avec les éditions de Fleurus qui disposent de plusieurs magazines jeunesse que j’aurai la collaboration la plus régulière à la fin des années 70. Beaucoup d’illustrations pour Perlin, des posters pour Djin (ex Cœurs Vaillants), également des « pages jeux » pour Pif gadget.

 

Annette, la femme d’un de mes copains d’études de Claude Bernard est la collègue de Michael Sadler à l’Institut Britannique à Paris. Michael Sadler, ami de Francis Van de Velde éditeur de musique (la méthose Rose de piano entre autres) vient de terminer comme scénariste une Histoire de la Musique Classique en BD en 3 tomes qui cartonne  assez . Le dessinateur de cette série Bernard Deyriès se lance dans l’animation (Inspecteur Gadget). Francis van de Velde et Michael Sader cherchent donc un nouveau dessinateur pour un futur projet qui pourrait marcher dans le même esprit : ROCK et BD. Annette sait que j’ai travaillé pour Rock et Folk et parle de moi à Michael.

Une rencontre est organisée…

 

Voilà donc où nous en sommes fin 1983, et je commence à me dire qu’une chance pareille ne se représentera pas de sitôt !