C. YAHIA. "ADORATION"

 

Une couleur matière, une pâte humaine, un style. Casimir revisité.

 



                                                ADORATION

 

                                               

Tu l’aimes cette bedaine 

C’est celle d’un Dieu

A la puissance tranquille

C’est ma richesse

Elle est pleine

Elle est ronde

Elle est blonde comme la margarine

 

Solaire

Elle triomphe tel un bonze

 

C’est mon enfant

C’est moi enfant

Complet et inconscient

 

Prévoyante

C’est ma réserve

 

Confiante

C’est par elle que ma respiration

Danse son va-et-vient

Zen et sensuel

 

C’est mon attribut

Mon phallus en procession

Partout

Glorieusement

Elle me devance

Elle est belle

Ma jolie panse

Elle est dense

Elle ronronne

Son cholestérol

Son sucre

Son alcool

Ses statistiques de mortalité

Toujours repue

Je la cultive

D’une caresse

Je la flatte

Me la confirme

Affectueusement

Elle donne à mes pas

Craquants sur le plancher

Leur réalité

Qu’on la nourrisse encore

Voilà qu’elle convoiterait tout l’espace

 

Plantes-y les crocs de lait de tes ongles acérés

Du bout de tes doigts fins

Et minéraux

Dépose-y un baiser mordant

Et du bout de ta langue

Ma bébé

Sur ma bedaine

Réécrit ce poème

En salive sympathique

 

Miroir de bave

Luisant

Où mon sourire satisfait

Répond narcissique

Au sourire doré

De ma bedaine laquée

Comme petit pain sucré chaud et fier

Tendre bouillotte d’amour domestique

 

Seule ma barbe fleurie

En royauté

La concurrence

 


 

Christophe YAHIA

est poète, philosophe et mauvais esprit.