JEF AEROSOL. In situ

Artiste pochoiriste français issu de la première vague de "street art" (art urbain) des années 80. Jef Aérosol travaille dans/avec la rue. Il revient en quelques questions sur le rapport de l'image présentée à l'espace urbain. Comment faire événement ? Ou pas.

 

Rencontre par mail F.Senaud 2014

 



fresque JEF AEROSOL au CHU de Bordeaux dans le cadre d'Octobre Rose (org. Keep a Breast / Street art Bordeaux)

Franck SENAUD
vous intervenez dans la ville depuis longtemps les espaces que vous choisissez ont-ils changés ? Etait- ce plus caché avant et aujourd'hui plus ouvertement visible ?

Jeff AEROSOL:
Je n'ai jamais "choisi" les espaces sur lesquels j'interviens en fonction du fait qu'ils soient "cachés" ou "ouvertement visibles" !

Certes, s'ils sont totalement "cachés", c'est-à-dire inaccessible au public, sans aucune visibilité, c'est qu'ils présentent un intérêt autre que la visibilité (leur spécificité, leur caractère historique, leur contexte particulier, leur beauté intrinsèque, leur force esthétique, leur témoignage culturel, etc...) et il s'agit alors d'un travail qui se révèlera au public par la photo ou la vidéo. C'est la démarche de Georges Rousse, par exemple. C'est aussi le cas d'artistes de land art comme le grand Andy Goldsworthy.

Si, en revanche, je sélectionne un espace uniquement en fonction de sa "visibilité", c'est-à-dire avec l'objectif avoué d'être vu par le plus grand nombre, c'est assez exceptionnel : il faut alors que, de surcroit, le lieu ait aussi une force en lui-même, de part son contexte géographique, culturel, historique, social ou humain...
Je ne suis pas de ceux qui cherchent à "être vus" à tout prix.

Mon travail, à l'instar de celui de mon ami Ernest Pignon-Ernest, est une démarche sur et avec le tissu urbain. Ce dernier est partie intégrante de l'oeuvre in situ.
Il ne s'agit surtout pas "d'exposer" dans la rue exactement de la même manière qu'aux cimaises d'un musée ou d'une galerie.

C'est pourquoi je suis assez étranger à cette notion de "caché / visible" que vous évoquez : ma réflexion et mon travail n'ont jamais vraiment pris ces paramètres en compte, à vrai dire.
Je peux aussi bien intervenir sur un mur ultra visible comme ma fresque de Beaubourg que dans un recoin de ruelle sombre peu fréquentée.
Tout est question d'à-propos, de cohérence et de sens, de contextualité, d'harmonie plastique, d'honnêteté artistique...

A SUIVRE