"Désormais je m’adresse à moi-même…
Depuis l’or souriant de la confiance
Voici le poème que je rapporte :
« Après le grand morcellement..."
ICAROS
Moi au sang turbulent
Moi au sang d’ortie
Moi qui ai ruminé chaque jour
La mauvaise farce d’être né humain
Moi qui ai pourri des milliers d’années
Dans la dent creuse du Diable
Moi qui ai mijoté cent ans
Dans l’horreur sanguinolente de l’esprit
Moi qui ai fermenté
Dans tous les marécages
De la folie
Moi qui ai subi la greffe simultanée
De deux braises ardentes
Sous chacune de mes tempes
Moi qui ai dû traverser
D’interminables déserts scatologiques
Moi dont les doigts
Comme des seringues
Contre toute malveillance
A tout être et à toute chose
Injectaient la nuit
Moi qui ai goûté
La chair cadavérique
De toutes les maladies
Moi qui aie dû survivre
A une grande diversité de morts
Moi au moi étoilé
Babel céleste dévorée
Par les piranhas
A la gueule diamantée
Pour devenir enfin Moi
Désormais je m’adresse à moi-même…
Depuis l’or souriant de la confiance
Voici le poème que je rapporte :
« Après le grand morcellement
Un vent aux mèches de chalumeau
Soufflant des quatre coins du monde
Me ressoudera mes membres
J’appellerai tous mes muscles par leur nom
Et mes os
Un à un
Deviendront conscients
Danse piétine danse
Entre les rasoirs du soleil
Piétine danse piétine
Le bitume sanglant des Mères
Danse piétine danse
De tes pieds éclosent
Des printemps fulgurants de sensualité
Ecorche un Dieu et revêtit-toi de sa peau
Pare-toi de son corps musical
Mord le ciel
Dernière bouffée de lucidité humaine
Dés l’instant d’à côté tu parleras un autre langage
Et tel un animal
Ton esprit
Redeviendra sensible à l’antique superstition des mots
Par ma bouche matrice
Pour chaque mot prononcé
J’engendrerai des Mondes
Les yeux clos
Je verrai mieux
Les yeux crevés
Je verrai tout
Le radium de ma vision traversera les corps
Laissant apparaître
Les monstres immondes
Qui habitent les hommes
Ou que les hommes habitent
Chenilles velues
Crapauds vérolés
Poux gorgés d’âmes
Je détiendrai le pouvoir
De guérir
Car j’aurai celui
De tuer
Ces épais et noirs parasites
Dont je fus l’hôte
Chirurgien des âmes
Epilateur mystique
Je plongerai
Mes dix becs de pie-verts
A l’assaut de ces monstres-frères
Enquilosés par l’éther
De mes poèmes psalmodiés
Puis je m’arracherai le cœur
Pour le jeter aux mâchoires ruminantes de la terre
J’y mettrai en sa place
Une pure orchidée de quartz
Sperme cristallisé d’esprit céleste
Et la moelle de mes os deviendra
Rivière de vérité !
C’est alors que j’invoquerai
Ma plus fidèle monture
Ma meilleure amie
Ma sœur de connaissance :
Une salamandre aux branchies ailées
Et aux yeux émouvants comme des phares
Agrippé à sa crinière échevelée
Passant d’un monde à l’autre
Je me ferai sorcier amphibien
Visitant les ombres et les rêves des autres
Ecoutez-la galoper…
Ensemble nous parcourrons les terres
Ensemble nous parcourrons les mers
Ensemble nous parcourrons les airs
Et retournerons au primitif feu dont je suis le Fils
Elle me chuchotera son savoir
En l’escudant au fond de ma gorge
Ma salive même deviendra savante
Je verrai les choses avec mon sang
Car c’est le sang qui voit
Et
A la fin de notre périlleux voyage
Comme à chaque crépuscule
Nous irons
Baignés d’une gratitude nerveuse et religieuse
Ma salamandre et moi
Au pied de l’ADN lumineux
Contempler ses couleurs éloquentes »
… A la sortie du labyrinthe
Digéré et pur
Ame et corps immaculés
Me dira-t-on mon nom ?
Christophe YAHIA
est poète, philosophe et mauvais esprit.
J'espère qu'aucun super-héros ne traine dans le coin !?
PREFIGURATIONS est aussi une association evryenne.
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